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Erskine Caldwell: son oeuvre, ses influences

Les plus accomplies des œuvres de Erskine Caldwell demeurent d'après moi, son recueil de nouvelles,  « Nous les vivants ». L'influence de Maupassant (1850-1893) y est évidente.      L'auteur dessine les paysans de Géorgie comme l'auteur de « Boule de suif », les paysans normands. C'est de ses contes qu'il a vraiment créé une nouvelle forme de littérature noire que, malheureusement, il a lui-même transformée en poncif. Quelques beaux regains pourtant comme « Un p'tit gars de Géorgie » (1943) ou encore « Deep South » (1968).




Le monde de Caldwell est celui des petits-blancs, des Back woodsmen, les habitants des collines de Géorgie, au Sud d'Atlanta, là où il est né.
Il n'a rien écrit de vraiment marquant après 1940, malgré une production régulière.
Caldwell a suivi un chemin qui semble avoir été celui des principaux écrivains américains de son temps. Né dans un foyer vagabond, il se lance sur les routes à 18 ans pour son propre compte. Il s' insrit à l'université de Virginie où il restera deux ans. Ensuite, il devient métayer dans le Maine bien décidé à n'en point sortir avant d'avoir placé un manuscrit quelque part.
Il connaît une réussite en 1932 avec « Tobacco Road » complétée en 1933 avec la nouvelle  « Un petit arpent de bon dieu ». On y retrouve des portraits de misérables paysans tels qu'il en a connu dans son enfance. Sur la route au tabac (traduction française), la famille de Jeeter Lester vit dans une pauvreté tragique. Ses enfants sont malades et déficients intellectuels. Toute la tribu est hantée par le sexe. La grand-mère vit une existence répugnante d' animal décati, réduite à mendier les restes.
Lorsque le fils de Lester séduira une prédicatrice en rut, affligée d'une nombreuse progéniture née au hasard des routes, il emploiera les économies de sa conquête à acheter une voiture sans savoir conduire. D'accident en accident, il la transformera en un tas de ferraille quarante-huit heures plus tard après avoir, au passage, tué la grand-mère.
Sans être dupe du misérabilisme qui entoure parfois la représentation qu'il donne de sa jeunesse, le lecteur averti de l' œuvre de Caldwell, sait que sa peinture de la misère extrême des paysans blancs et noirs du Sud est fondée sur une connaissance intime de ces gens.
Sortant non diplômé de l'université de Virginie, il acquit son éducation en voyageant et en faisant toutes sortes de petits boulots. Une expérience de journaliste affecté aux faits divers lui apprendra ainsi, comme il le raconte lui-même dans « Mais l'art est difficile », à n' écrire que l'essentiel, car son rédacteur en chef est un maniaque de la lecture.

L'un des intérêts de ce livre est de montrer à quel point la solitude, le poids des habitudes, le manque d' horizon peuvent gravement atteindre l'individu dans son équilibre mental, dans son comportement quotidien.
La dénonciation des pratiques peu scrupuleuses des banques est également bien relatée notamment par la vision très matérielle que l'auteur nous en offre.
Avec des mots très simples, il s'agit d'une interrogation sur le libéralisme et ces incidences dans la petite existence du tout un chacun. Montrer le lien entre une idée économique et ses conséquences pratiques sur le citoyen lambda.

Jeeter Lester, héritier d'une vielle famille d' agriculteur, n'a pas senti le vent du changement tourner. La crise agricole qui touche les Etats-Unis du fait d'une surproduction qui mène à des prix très bas ainsi que l'implication de plus en plus importante des banques et usuriers, ne lui permettent plus de nourrir sa famille. Sa progéniture, attirée par une vie meilleure de citadin, dans les usines de la ville, n'a plus guère de lien avec lui, aveuglée qu'elle semble être par un individualisme radical et un égoïsme sans borne. Les vieilles solidarités se brisent, mis à part pour un jeune fils abruti par l' isolement et une éducation trop succincte.
Deux de ses filles également, demeurent proches du foyer, l'une, trop laide pour trouver époux pour ne pas dire acquéreur, l'autre déjà mariée mais rêvant des feux de la ville et insatisfaite par un mari qui ne songe qu'à rassasier son appétit sexuel.

Le tableau est complété par sa femme Ada, qui a bien rempli son rôle de mater familia en  donnant à Jeeter dix-sept enfants plus ou moins de lui d'ailleurs. Elle ne songe plus qu'à mourir en portant sur elle une robe qu'on pourrait qualifier de "dernier cri".
Enfin, on trouve la grand-mère, négligée et dont on n' attend plus que la mort en l'y aidant si nécessaire avec Sœur Bessie, une prédicante bon pied bon œil et elle, à la robe plutôt légère.



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